Les scieurs descendent dans la rue

Le 7 octobre 2014, les scieurs de la Fédération Nationale du Bois (FNB) ont prévu de manifester devant l'Assemblée Nationale pour protester contre l'accroissement des exportations de grumes vers l'Asie. Après avoir rencontré deux fois Stéphane Le Foll à l'été 2014 pour expliquer les dangers de cette fuite de la matière première, les scieurs de la FNB protestent devant l'absence de mesures prises.

Pour enrayer ces ventes de grumes vers l'Asie, qui font grimper les prix et assèchent la ressource, les scieurs de la FNB demandent l'instauration de mesures sanitaires et d'une politique de quotas qui a fait ses preuves aux Etats-Unis. En effet, il semble que la plupart des grumes qui quittent l'Europe ne soient pas traitées contre les insectes, comme la législation l'impose. Les scieurs de la FNB veulent être reçus dans les plus brefs délais par Manuel Valls, premier ministre, afin d'expliquer les risques sur l'emploi et la dynamique d'une filière bois identifiée comme un secteur d'avenir.

Ce sont d'abord les exportations de grumes de résineux qui ont augmenté
Selon l'organisme Eurostat, cité par French Timber dans sa lettre d'information Isibois, les exportations de grumes de résineux vers la Chine ont doublé entre 2011 et 2013, atteignant 391.043 mètres cubes. D'autres grumes pourraient transiter par la Belgique, dont les importations de grumes françaises de résineux ont augmenté de 32% sur la même période à 697.260 mètres cubes, sans raison apparente. Néanmoins, dans le même temps, les exportations vers l'Allemagne ont été divisées par deux à 200.080 mètres cubes.

Du côté des feuillus, la situation était beaucoup plus stable, même en baisse : la Chine n'achètait plus que 85.589 mètres cubes de grumes chêne en 2013 contre 104.798 deux ans plus tôt. Evolution semblable pour le hêtre en baisse à 79.364 mètres cubes contre 90.107 en 2011. Les autres pays d'Asie sont par ailleurs négligeables en quantité. En fait, si les exportations de hêtre ont augmenté de 10% en trois ans, c'est le fait de pays... européens. Selon Eurostat, les exportations globales de grumes ont baissé entre 2011 et 2013. C'est finalement le plus surprenant. Les exporations de grumes de hêtre progressent de 10% à 440.896 mètres cubes mais celles de chêne baissent de plus de 6% à 352.920 et celles de résineux de plus de 21% à 2,4 millions de mètres cubes. Pas de quoi mettre des scieurs dans la rue. Alors la situation a-t-elle à ce point empiré depuis début 2014 ? Sans doute, ou bien c'est la récolte de grumes qui a baissé.

Les scieurs tirent la sonnette d'alarme sur la dégradation rapide depuis septembre 2013
Contacté sur le sujet, Eric Julien, dirigeant de la scierie Eurochêne, n'y va pas par quatre chemins : "Depuis un an, les prix des grumes de chêne et de hêtre ont augmenté de 40%. Dans l'Est de la France, l'ONF détient 80% de la forêt. D'un côté ses ventes de bois ont baissé en volume. De l'autre, elle vend des bois coupés au plus offrant, achetés par des tradeurs européens et exportés en majorité vers l'Asie. Ce double effet prive des scieries de matière première et des entreprises importantes sont en train de fermer. Il est urgent de trouver une solution. En plus des mesures de quotas et de contrôle sanitaire, il faut revenir à une vente des bois sur pied, toutes qualités confondues et que l'ONF laisse aux professionnels le travail d'exploitant forestier. Et qu'enfin le serpent de mer de la contractualisation des approvisionnement (la garantie de livraison en volume et en qualité par l'ONF à un prix donné) devienne une réalité. Ou bien nous perdrons un secteur industriel pourtant jugé d'avenir".